Résumé éditeur :
En quatre décennies, les jeux vidéo sont devenus une des premières industries culturelles mondiales. La révolution numérique et la connexion des jeux ont accéléré leur diffusion et leur impact culturel. Véritables mondes virtuels, ces jeux sont habités par des avatars mus par des joueurs intensifs. Cette dynamique d’intégration croissante et forte du numérique au cœur du social interroge nos humanités en devenir. On assiste, selon certains, à la montée en puissance « d’accros de masse » aux nouvelles technologies, voire à ces mondes d’un nouveau continent, le continent virtuel. Cette dépendance est celle aux GSM, toujours a? proximité de nous et sans lesquels nous ne pouvons plus vivre, ou à travers le nombre d’heures incommensurable passées à jouer en ligne.
Alors que signifie cette pratique intensive ou excessive du digital en ce compris des jeux vidéo ? Est-ce une mutation d’une humanité connectée et réticulaire ? Est-ce un nouvel opium de peuple qui permettrait de vivre dans monde injuste et atone ? Ce livre tente de donner des réponses à ces questions en analysant l’émergence des pratiques numériques et celle des imaginaires sous-jacents.
Critique :
Tout d’abord je souhaiterais remercier Babelio et les éditions Karthala pour cet essai passionnant, stimulant et bien documenté que j’ai obtenu dans le cadre du Masse Critique de février.
Les réflexions menées dans cet essai partent tout d’abord du constat de la stigmatisation des jeux vidéos alors que c’est une activité qui se démocratise de plus en plus, aussi bien parmi les plus jeunes mais aussi parmi les générations plus âgées.
L’auteur s’interroge sur la figure du hardcore gamer, du no life qui passe son temps devant son ordinateur à jouer et sur la stigmatisation de ce type de loisir. Le jeu vidéo est-il le nouvel “opium du peuple,” c’est-à-dire un palliatif, un moyen d’échapper à la réalité plutôt que de l’affronter ?
Cet essai prolonge la réflexion entamée dans l’ouvrage précédent de cet auteur, ”Dans la peau des gamers” qui donnait une approche anthropologie d’une communauté dans World of Warcraft. Dans ce 1e ouvrage, l’auteur démontre que, contrairement aux idées reçues, le mmorpg World of Warcraft est un jeu social : au lieu de couper les joueurs les uns des autres, il les oblige à s’intégrer à une communauté de joueurs, une guilde mais qu’en même temps il oblige à mettre en place une sociabilisation différente.
Cet essai est donc dans la continuité de l’ouvrage précédent mais il approfondit certaines réflexions qui sortaient du cadre strict proposé par le premier ouvrage et tente de répondre à certaines questions beaucoup plus larges : si le jeu est une échappatoire, à quoi les joueurs tentent-ils d’échapper ? quelle image ont-ils du monde qui les entoure pour éprouver un besoin de le fuir ? L’auteur revient sur les changements qui ont eu lieu depuis les années 80 dans le domaine des jeux vidéo (la démocratisation de ce passe-temps, l’évolution des techniques, notamment d’internet qui a popularisé les jeux en ligne et donc à plusieurs) et sur la place que ce loisir peut prendre.
Comme l’ouvrage précédent de cet auteur, cet essai est très riche et très documenté. L’auteur renvoie à de nombreux textes théoriques et de recherches sur des domaines très vastes. Il fait preuve de pédagogie dans son traitement des recherches de ses confrères. Il s’appuie aussi sur des questionnaires remplis en Belgique par des adolescents et jeunes adultes sur notamment leur rapport au digital mais les remarques présentées dans cet essai ne se limitent pas à cette génération. L’essai se veut passeur d’idées et synthétique. Le texte est fluide, accessible mais j’ai trouvé le texte si riche en idées que j’ai du mal à résumer le fil directeur et, bien que je comprenne le détour pris pour expliquer en quoi s’immerger dans les jeux vidéo peut sembler être une fuite en avant, au final le jeu vidéo est véritablement traité qu’en fin d’ouvrage.
J’ai aimé cet essai, il est très stimulant mais je pense qu’il me faudra peut-être le relire plus tard avec un peu de recul pour bien assimiler la quantité d’informations et d’idées développées.