Ce roman relate la traversée de l’Océan Atlantique par le navire Star of the Sea en 1847. Ce bateau emporte vers le nouveau monde toute une galerie de portraits : des riches, des pauvres, des nobles et des paysans, des anglais… La traversée ne va pas être de tout repos car très tôt on apprend qu’un meurtre se prépare.
Résumé ainsi, cela ressemble à un roman policier et par certains aspects, c’en est un mais un peu comme à l’envers. Dès le départ, on sait qu’un meurtre sera commis, les mots “murderer” et “victim” apparaissent dans les titres mais ce roman est beaucoup plus que cela et beaucoup plus complexe.
Tout d’abord, ce roman est présenté comme le “dossier” constitué au fil des années par le journaliste américain Dixon sur cette traversée et sur ce qui s’y est passé. Donc certains chapitres sont des extraits du journal de bord du capitaine Lockwood ou du chirurgien du bateau Mangham. Il y a aussi des documents qui ne sont pas fictifs : des illustrations provenant des journaux d’époque, des extraits de lettres d’inconnus sans rapport avec l’histoire du roman. Le narrateur signale parfois comment il a obtenu certaines informations (ex: rapporté par X, tant d’années plus tard etc).
On suit surtout Lord Merridith, un jeune noble anglais dont la famille avait, pendant plus de deux siècles, des terres en Irlande. Il est accompagné de sa femme, Laura, fille d’un marchant prospère, et de leurs deux fils. Il y a aussi la nounou, Mary Duane, irlandaise de naissance. Autour d’eux, tournent de nombreux personnages : un homme étrange avec une jambe de bois, un Maharadja.
C’est un roman où l’Histoire tient une place importante : par les documents fournis mais aussi par les conséquences sur l’intrigue. Dans les années 1840, l’Irlande subit une maladie de la pomme de terre, qui constitue l’essentiel de leur alimentation, et donc une famine dévastatrice (un million de morts selon certains historiens). Pour essayer de survivre, nombreux irlandais vont émigrer aux Etats Unis et au Canada, de gré ou de force (époque où pour des raisons notamment fiscales, les propriétaires expulsaient leurs locataires trop pauvres pour payer le loyer). C’est cette Grande Famine qui est derrière ce voyage : Merredith était un grand propriétaire, Mary Duane et d’autres dans le bateau sont des irlandais pauvres qui cherchent un monde meilleur. Ce roman est aussi très intéressant sur le plan historique donc, d’autant plus qu’il est bien documenté (entre les extraits de vraies lettres, d’illustrations d’époque etc etc).
J’ai trouvé que c’était une lecture intéressante, un peu difficile au départ à se plonger dedans et enrichissante. C’est bien construit, au point qu’on se demande au final où est la frontière entre le réel (les documents d’époque) et le fictif.