Petit mot sur l’auteur : selon la jaquette, Cabell est l’auteur de 17 livres. Il a aussi écrit des critiques de livres pour divers journaux et magazines. Et certains de ses livres se concentrent sur un auteur en particulier. On peut donc dire qu’il est coutumier de l’exercice.
Ce livre, the Spirit of Fantasy, n’est pas une biographie. Au départ cela ressemble beaucoup à une étude de l’évolution du style de Pratchett (j’aime pas le terme style mais à défaut de mieux) puis les chapitres passent de chronologiques à thématiques.
Les bons cotés du livre
Cabell fait preuve d’une grande culture. Il remet la production de Pratchett en contexte par rapport à ce qui sortait à l’époque, ce qui amène Cabell a comparé beaucoup Pratchett à Douglas Adams. Malheureusement à mon gout, je dirai que Cabell montre un peu trop sa culture et ce, pas forcément de manière pertinente. Cabell cite beaucoup, trop à mon goût.
Il est bien documenté en ce qui concerne Pratchett. Il le cite pas mal. Dommage que les extraits d’interview ne soient pas mieux référencés. Bref il dit “Pratchett a dit ça” sans préciser quand, où, à quelle occasion etc etc.
J’ai apprécié un certain nombre de réflexions. Le fait que la SF de Pratchett était plus de la fantasy dans un vaisseau spatial que de la pure science-fiction d’où l’évolution vers le disque-monde. Je n’ai pas lu les romans de SF de Pratchett mais je garderai son point de vue en tête quand je les lirai. En attendant je ne me prononce pas.
Une autre idée intéressante de Cabell : la remise en question du coté “pour enfants” de certains livres. Cabell soutient que les romans de Tiphaine contiennent trop de réflexion et pas assez d’action, et que les thèmes conviennent plus à de jeunes adultes qu’à des enfants. Il montre comment les aventures de Tiphaine permettent à Pratchett de mettre en scène le passage de l’enfance à l’âge adulte de son personnage.
La posture de Cabell vis-à- vis de Pratchett me plait bien. J’apprécie sa capacité à contester ou remettre en doute certaines assertions de Pratchett, notamment quand ce dernier prétend que la SF n’est qu’une sous catégorie de la fantasy.
Un dernier bon point pour le livre de Cabell est le fait qu’il prend en compte les derniers développements. Je pense notamment à Nation et Cabell dégage de manière convaincante les points communs que cette œuvre à avec le reste de la production de Pratchett.
Les regrets maintenant.
Tout d’abord une petite inexactitude mais qui souligne bien le parti pris de Cabell. Il signale que les Nac Mac Feegle apparaissent pour la premiere fois dans les Ch’tits hommes libres. Que nenni ! Si mes souvenirs sont bons, ils font irruption à Lancre dans Carpe Jugulum. Ca pourrait n’être qu’un petit détail mais cela révèle surtout la préférence de Cabell pour les œuvres les plus vieilles de Pratchett. Selon Cabell, un auteur se donne beaucoup plus dans ses premières œuvres que dans les plus récentes. Cabell mentionne à peine la séquence des sorcières (qui est sans aucune doute ma préférée d’où peut être mon ressentiment face à son silence). Son étude de l’évolution de Pratchett s’achève là où l’évolution commence véritablement à mon avis, c’est à dire avec Trois Soeurcières. Bref un gros trou à mon avis mais il en a conscience et semble l’assumer.
Cabell souligne la présence du thème du passage à l’âge adulte dans un certain nombre de romans (les romans de Tiphaines, Mortimer etc) mais, vu qu’il occulte une partie des romans, il ne peut pas se rendre compte de l’omniprésence de ce thème car il me semble bien que dans tout roman de Pratchett il y a au moins un personnage qui subit une initiation de ce genre, que ce soit Carrot, Magrat, Agnes, Lavoine etc etc.
Conclusion.
En discutant avec Leia, elle m’avait fait part de sa crainte d’une exploitation commerciale de la maladie de Pratchett. Je ne pense pas. Ce livre se veut un véritable hommage envers l’homme et l’admiration se ressent énormément.
Mon principal regret se trouve dans la nature batarde à mon avis de son livre. Ni vraiment ouvrage sérieux comme ceux de Butler, ni vraiment purement fan. Manque de soutien théorique pour être sérieux mais esprit critique qui ne correspond pas à mon avis à l’état de fan.