Résumé :
Meiringen, Suisse. Les pompiers dégagent l’accès à l’hôtel Baker Street, coupé du monde pendant trois jours à cause d’une avalanche, et découvrent un véritable tombeau. Alignés dans la chambre froide reposent les cadavres de dix universitaires qui participaient à un colloque sur Sherlock Holmes. Le meilleur d’entre eux devait être nommé titulaire de la toute première chaire d’holmésologie de la Sorbonne. Le genre de poste pour lequel on serait prêt à tuer…
Hommage à Sherlock Holmes et à Agatha Christie, rebondissements, suspense et humour (anglais) : « Élémentaire, mon cher Watson ! »
Critique :
Difficile de savoir pour où commencer tellement il y a de choses à dire. Pour une fois, je vais commencer par une citation, histoire de donner le ton.
“Durieux est le genre d’homme à sacrifier sa famille pour son travail. Mais heureusement pour sa famille, Durieux n’en a pas. Il a bien noté plusieurs fois sur la liste des courses de penser à se marier et à avoir des enfants, mais le préalable consistant à convaincre un être vivant de sexe féminin d’entretenir avec lui des relations génitales lui a toujours paru relever d’un non-sens métaphysique. Ce n’est pas que les femmes lui déplaisent, loin de là. A l’instar de Sherlock Holmes, il leur accorde même une fonction décorative bien supérieure à celle des poissons exotiques qui surnagent en eaux troubles dans son salon. Non, l’explication est simple : le professeur Durieux a autre chose à faire qu’à perdre son temps à satisfaire les bas instincts hérités de nos lointains ancêtres simiesques. […] C’est en tout cas ce que le professeur Durieux proclame devant tous ses amis. Mais heureusement pour ses amis, Durieux n’en a pas.” (p 80-81).
Le roman débute par l’arrivée du propriétaire de l’hôtel Baker Street, aidé de Poséidon (un pompier assez obtus pour le moins) sur les lieux. Ils découvrent les corps des universitaires dans la chambre froide et le commissaire Lestrade, appelé à la rescousse, se plonge dans les papiers laissés par les différentes victimes. Ainsi, la narration change régulièrement de point de vue, entre les notes prises par Audrey, journaliste sous couverture, et les lettres de Dolorès (l’une des universitaires présentes) adressées à son confesseur … Bref points du vue variés, qui se complètent bien et fragmentent le récit afin de mieux perdre le lecteur… Heureusement pour nous, Lestrade résoudra l’affaire avec brio (ou pas) (mais je vous laisse lire le roman pour vous faire une idée du dénouement).
Tout est agréable dans ce roman : son humour irrévérencieux, ses personnages typés et ses connaissances sur Sherlock Holmes. Ce roman est aussi bien une enquête loufoque (basé sur le schéma stéréotypé du huis clos) qu’une étude assez approfondie du personnage de Sherlock Holmes et de la littérature qui découle de ce mythe. D’ailleurs le roman se clôt sur une bibliographie rassemblant aussi bien les textes d’origine, que des sources plus sérieuses et d’autres qui le sont beaucoup moins (moins sérieux mais pas sans intérêt ^^).
Bref, un roman intelligent, irrévérencieux et érudit. Un délice. Et pour la forme, je vous offre une autre petite citation (parce que j’adore le style de cet auteur et que je compte bien essayer de mettre la main sur les autres romans de ce dernier).
“Ainsi, mon père, Rodriguez gisait au pied de l’escalier. Il gisait même comme peu de gens savent gésir. Par un phénomène étrange, lui qui avait toujours été difforme avait retrouvé une certaine harmonie dans la dislocation, comme un Meccano mal monté à cause d’un mode d’emploi en chinois dont la chute aurait réorganisé l’assemblage des pièces” (p 92).