Présentation de l’éditeur (l’Atalante)
États-Unis, début des années 1930. Les dirigeables sillonnent le ciel, Berlin est peuplée de zombies et la magie, apparue depuis près d’un siècle, a changé la donne. Le grand public hésite entre admiration et haine des « actifs », ces gens qui se téléportent, lisent dans les esprits, modifient la gravité, contrôlent les animaux, guérissent par imposition des mains…
Deux organisations de magiques se livrent une guerre souterraine acharnée : l’Imperium et son maître le « président », qui tiennent le Japon, et le Grimnoir, société secrète de résistants aux intentions louables mais aux méthodes discutables.
Jake Sullivan, lui, vétéran de la Grande Guerre au passé de truand, ne doit la liberté qu’à son serment de mettre ses pouvoirs au service du FBI chaque fois qu’une enquête implique des « actifs » criminels. Il sera bientôt confronté aux véritables enjeux géopolitiques d’un monde au bord de l’enfer et de la destruction ; il lui faudra choisir son camp.
Magie brute, dans un style très visuel et percutant, mêle gangsters, superhéros désinvoltes et désabusés, jolies filles teigneuses, bagarres épiques et armes à feu à tous les étages. Roman de fantasy urbaine à la croisée du polar, du steampunk et de l’uchronie, ce premier livre des « Chroniques du Grimnoir » louche aussi sur le double héritage des comics et des pulps américains.
Critique
Je partage l’approche de l’éditeur sur deux points : le coté assez inclassable du roman et l’héritage des comics.
=> Le genre du roman
J’aurais eu tendance à le classer comme du fantastique et non de la fantasy. Ca se passe dans notre monde, pas un monde différent et l’irruption des pouvoirs magiques a bien cet effet inquiétant tel que le fantastique (et son extrême l’horreur) le développe. Du steampunk, oui sans aucun doute avec tous ses dirigeables qui planent aussi des Etats Unis. Du polar, oui aussi avec un coté très roman noir américain avec un enquêteur malmené et cet environnement si profondément corrompu. Et enfin de l’uchronie puisque Hitler a été exécuté dès 1929, Berlin a été isolé par un grand mur et ce qui se passe derrière …
=> L’héritage comics.
Je ressens surtout cet héritage dans l’intrigue ainsi que dans la caractérisation des personnages. Les “actifs”, ceux qui disposent de pouvoir magique, se rangent en plusieurs catégories : les lourds (qui peuvent modifier gravité et densité), les guérisseurs ou encore les liseurs (qui lisent l’esprit). Bref des pouvoirs qui ne sont pas originaux quand on lit un peu les comics de superhéros.
Coté intrigue, remplacer ce don magique par une mutation et vous avez (au départ) l’intrigue des X-Men (version films) : d’un coté un actif très puissant, très physique (Sullivan / Wolverine) qui fait un peu bande à part et qui se fait recruter par l’un des deux camps (le Grimnoir / l’académie de Xavier) dont les buts sont multiples : former des jeunes actifs qui découvrent leur pouvoir et contrecarrer les plans de l’autre camp (l’Impérium / l’équipe de Magneto) qui cherchent à instaurer une domination des actifs sur le monde. D’un côté, une équipe qui se forme peu à peu, avec des personnalités diverses et des tensions (Grimnoir / l’académie de Xavier), incluant une nouvelle recrue douée et un peu impulsive (Faye / Malicia, enfin le coté impulsif se retrouve aussi chez Wolverine), une équipe qui reste dans l’ombre alors que l’autre camp (l’Impérium / Magnéto) se dissimule un peu mais quand même beaucoup moins. On compare les méthodes, conviction contre emploi de la force. Bref je trouve beaucoup de Xmen dans ce roman
=> Pas d’originalité ?
Si si. Quand on fait le point sur la littérature, on se rend compte que la réécriture et l’adaptation a toujours pris une place très importante dans la production littéraire (et même culturelle). Ce qui n’empêche pas de mettre en oeuvre une certaine originalité.
L’originalité de cette oeuvre réside dans son style, très agréable, sur l’intrigue plus “policière”, sur le détail de ses personnages et sur leur vécu. Sullivan correspond sur certains points à Wolverine mais ce n’est pas Wolverine. L’ambiance est aussi assez particulière.
Une dernière originalité réside dans la source de la magie et sur une réflexion sur celle-ci. Alors que les X-Men soulève la question des mutations, ce roman se penche sur la source de cette magie qui n’est pas ici une mutation. Enfin c’est plus compliqué que cela.
Premier tome d’une série, Magie Brute se révèle difficilement classable. L’auteur semble très influencé par les comics et cela se ressent sur tout un pan de l’intrigue. Un premier opus assez prometteur. Tout dépendra de l’évolution que la série prendra par rapport notamment à cette influence lourde des comics (peut être un peu trop lourde pour le moment).